La séparation

Souvenir d’une union narcissique (idéalisée et idéalisante) que le sujet a formée dans sa toute petite enfance avec sa mère; toute relation devient fusionnelle, aspire à l’être ou tend à s’imposer comme telle. La séparation est invivable, si ce n’est au prix de tiraillements insensés, de cris, de crises, d’appels qu’aucune réponse ne viendrait jamais satisfaire. En écho à ce passé-image d’une union idéale dont on se refuse (dont on ne parvient) à faire le sacrifice. Comme si l’autre faisait partie de soi-même ou n’existait que pour « soi m’aime ». Mais s’aime-t-on ? Aime-t-on ? lorsque l’on ne supporte pas que l’autre s’éloigne et lorsqu’on lui rend l’éloignement insupportable ? Qu’il soit lié à un décès, au départ soudain d’une nourrice ou à un sentiment diffus, lorsque le désespoir perdure et plonge dans la mélancolie, il est préférable d’aider, l’enfant réel ou celui qui reste en soi, à assimiler la « réalité pour soi » de ce qui l’a engendré, à la digérer, à la transformer, en faire une source d’évolution, car passage obligé, contre lequel on ne peut rien, si ce n’est contre soi.

Souvent le sentiment d’abandon qui s’empare de nous s’accompagne d’une jouissance qui ne s’avouera pas comme telle dans la répétition ou dans l’idéalisation.Il faut renoncer à l’illusion d’obtenir ce que l’on n’a pas obtenu. À ne plus se réfugier derrière l’aveuglement dans un passé idéal qui n’aura plus cours. À convertir notre histoire pour la reconstruire sans plus se rattacher à la cause pour justifier un malheur mais approcher celui-ci pour dénouer les tensions, décomposer l’image que l’on a de « soi m’aime ».
Il faut apprendre à accepter sa partie souffrante, à la nommer, à la reconnaître, à ne plus en avoir honte, à l’appréhender, la comprendre, la réinscrire dans son histoire au présent, en d’autres termes. Un travail sur soi permet de reconquérir autonomie et indépendance psychique dont la jouissance pour le coup est porteuse de vie, d’espoir, de lendemains. Mais quel que soit le fait qui préfigure à ce sentiment, il est important d’aborder sa complexité dramatique. Afin que l’impression de ne pas exister en tant que sujet ne soit pas confirmée, mais démentie par la vie…
Le plus difficile restant de renoncer à la tristesse, à l’émotion, à la nostalgie qui sont le corollaire d’un événement qui nous aura marqués, émus, rendus tristes. Quand le chagrin, la colère, après l’indifférence ont un petit goût qui nous permet de rester en lien avec l’objet de notre tourment. Il faut passer par cette épreuve de longue haleine mais combien libératrice pour se désengager d’une relation ancienne.

Un événement marquant, aussi cruel soit-il, devrait pouvoir, avec le temps, la distance, être traduit de façon positive. Question de regard, d’assimilation, d’enrichissement par l’expérience. D’histoire personnelle et d’imagination.. De transposition du passif en actif et de conversion d’énergie

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