psychologue

Être clinicien

Être clinicien, c’est accepter de remettre toujours en cause les acquis. C’est être éternellement frais pour retrouver l’enfant en soi, dans une perpétuelle récréation et re-création. S’amuser, re-créer, jouer et innover afin de mourir et renaître à soi et au monde.

Le clinicien ne doit plus se fier uniquement aux seules ressources de sa science et de ses mythes. Il lui faut les dépasser.
La technique appliquée de façon orthodoxe devient une vitre d’impersonnalité et de défense.
On a trop oublié l’homme ces dernières années. Le sujet, souvent désespéré, est calfeutré derrière sa souffrance, désossé de tout désir, à la dérive, “le ciel est vidé”, en quête de sens.
Qu’est-elle cette rencontre, ou plutôt que devrait-elle être, si ce n’est celle de deux êtres authentiques, où l’un va baliser un chemin pour aider l’autre à tisser l’union de son Être au Monde.
Et la notion centrale est celle du temps. Il y a un temps à vivre, car avant celui de la liberté, le patient va suivre les passages de l’ombre à la lumière; marche après marche, en plusieurs étapes qui soutiennent son itinéraire intérieur. Le temps est celui d’une herméneutique, et le patient pénètre peu à peu l’espace thérapeutique.

Le temps de la marche thérapeutique vers le symbole, et le symbole de la marche sont imprégnés par une forme et un contenu (théorie du voilé-dévoilé). La transparence de la joie se manifeste quand celui que j’accompagne découvre enfin la force “immense” qui le porte.

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La société

Aujourd’hui, tout repose sur l’éphémère. L’amour, désormais le seul qui sert de ciment et de justification à l’union conjugale, a toutes les chances de se défaire dès lors que la relation amoureuse ne tient plus ses promesses de bonheur et surtout, d’accomplissement individuel. Comme le résume si bien De Singly (1996), la relation conjugale ne repose désormais plus que sur « de l’amour, rien que de l’amour, mais pour le temps que dure l’amour ». De ce fait, à quoi bon institutionnaliser une relation si celle-ci n’est pas destinée à durer ?

Pour vivre ensemble, chacun doit accepter de ne plus décider seul les règles de vie, il a cette obligation de tenir compte de l’autre tout en continuant à tenir compte de lui-même. Mais lorsque l’homme est en couple, il est privé d’une certaine forme de liberté, il faut ainsi pouvoir trouver un équilibre qui est toutefois délicat à maintenir, car il faut faire attention à l’autre, au couple, mais aussi à son épanouissement personnel. Encore faut-il que la conception de l’un et de l’autre de la vie commune soit considérée de la même façon dans le couple.

la société actuelle ne fait que renforcer davantage cet individualisme et ce désir de penser à soi avant de penser à l’autre, avec l’arrivée du téléphone, la télévision ou la musique, tout cela empêche de passer certains moments ensemble car l’être humain fait entrer un tiers. Le couple n’est alors plus composé de deux personnes et ne forme plus de « nous » puisque le principal but est de se satisfaire soi-même. Ce mode de fonctionnement nous entraîne à n’accepter aucune frustration ou refus de la part de l’autre. De ce fait, la patience est nécessaire et essentielle dans le couple, mais cela devient problématique face à cette société qui prône l’immédiateté. Dans la majorité des cas, la faute est constamment rejetée sur l’autre, sans remise en question de soi même. Un certain égoïsme apparaît alors, et empêche la communication et la compréhension dont le couple a besoin pour s’épanouir.
Cette manière de vivre le couple est indéniablement le reflet de tout cet individualisme, véhiculé par les informations, les magazines et productions cinématographiques. De plus, avec la démocratisation d’internet, et surtout avec la montée en puissance de ses affidés que sont Facebook et Twitter, ce nouveau siècle se révèle à lui-même, où une vaste entreprise d’auto-glorification narcissique demeure. Et c’est sur ce point que la psychanalyse a son mot à dire face à cet individu en mal de repères, ballotté dans un siècle sidérant de complexités, lui même dépassé par cette sarabande folle qui tend à faire passer le superflu pour l’essentiel, à confondre la belle idée de progrès avec celle de l’immédiateté, à contraindre l’homme de se comporter uniquement comme un consommateur avide de se procurer la dernière imbécillité en vogue sans jamais s’interroger sur sa réelle nécessité. Aujourd’hui tout repose sur l’immédiateté, sur le condensé. On réduit une actualité à une vidéo de 6 secondes, à un snapchat, ou à un titre qui ne doit pas dépasser 140 caractères. Tout cela contribue à rendre l’homme de plus en plus impatient, le poussant parfois à se comporter lui même comme un animal. Il faut sortir de cet étalage de vanité et arrêter de se conformer à cette forme acceptée de la folie numérique. Car désormais, l’homme se traîne, il est perpétuellement insatisfait, amer, recroquevillé sur lui même, apeuré, triste et surtout malheureux de ne pas posséder des biens qui une fois qu’il les a acquis, le rendent encore plus solitaire, encore plus divorcé de lui même, encore plus avachi dans les fosses communes d’une fausse modernité incapable d’enluminer sa misérable vie. Tout cela, tout ce façonnement que la société créé chez l’homme a un impact direct sur le couple. Par cette envie chez l’homme de se satisfaire de choses superflues, cela l’engloutit dans un mode de pensée restreint qui empêche d’aimer, de partager et se laisser aller. On est plongé dans cette société, où la quête d’indépendance, d’autonomie et d’épanouissement personnel est tellement ancrée, qu’on en oublie l’autre. C’est cet individualisme social projeté sur le couple qui est la cause de son déclin, provoquant ainsi l’apparition de multiples symptômes que ce soit chez le couple lui même, ou/et surtout chez l’enfant.

Cette autonomie et individualisme grandissant au sein des relations conjugales a surtout bénéficié aux femmes. Car elles ne sont plus confinées à l’univers domestique, mais sont désormais aspirées à prendre part à la production du monde, à s’engager professionnellement, socialement et politiquement. Ainsi, elles refusent désormais de se laisser enfermer dans cet univers domestique ; mais aussi à nouer des relations égalitaires avec les hommes que ce soit sur le plan affectif, sexuel, économique, juridique. Égalité voulue aussi bien dans l’espace privé que public donc.
En un mot, la relation conjugale n’est acceptée qu’à condition qu’elle soit épanouissante pour elle.
De ce fait, chacun ne se préoccupe désormais que de sa construction identitaire sur le plan à la fois scolaire et professionnel, avant d’entamer une relation conjugale.

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La séparation

Souvenir d’une union narcissique (idéalisée et idéalisante) que le sujet a formée dans sa toute petite enfance avec sa mère; toute relation devient fusionnelle, aspire à l’être ou tend à s’imposer comme telle. La séparation est invivable, si ce n’est au prix de tiraillements insensés, de cris, de crises, d’appels qu’aucune réponse ne viendrait jamais satisfaire. En écho à ce passé-image d’une union idéale dont on se refuse (dont on ne parvient) à faire le sacrifice. Comme si l’autre faisait partie de soi-même ou n’existait que pour « soi m’aime ». Mais s’aime-t-on ? Aime-t-on ? lorsque l’on ne supporte pas que l’autre s’éloigne et lorsqu’on lui rend l’éloignement insupportable ? Qu’il soit lié à un décès, au départ soudain d’une nourrice ou à un sentiment diffus, lorsque le désespoir perdure et plonge dans la mélancolie, il est préférable d’aider, l’enfant réel ou celui qui reste en soi, à assimiler la « réalité pour soi » de ce qui l’a engendré, à la digérer, à la transformer, en faire une source d’évolution, car passage obligé, contre lequel on ne peut rien, si ce n’est contre soi.

Souvent le sentiment d’abandon qui s’empare de nous s’accompagne d’une jouissance qui ne s’avouera pas comme telle dans la répétition ou dans l’idéalisation.Il faut renoncer à l’illusion d’obtenir ce que l’on n’a pas obtenu. À ne plus se réfugier derrière l’aveuglement dans un passé idéal qui n’aura plus cours. À convertir notre histoire pour la reconstruire sans plus se rattacher à la cause pour justifier un malheur mais approcher celui-ci pour dénouer les tensions, décomposer l’image que l’on a de « soi m’aime ».
Il faut apprendre à accepter sa partie souffrante, à la nommer, à la reconnaître, à ne plus en avoir honte, à l’appréhender, la comprendre, la réinscrire dans son histoire au présent, en d’autres termes. Un travail sur soi permet de reconquérir autonomie et indépendance psychique dont la jouissance pour le coup est porteuse de vie, d’espoir, de lendemains. Mais quel que soit le fait qui préfigure à ce sentiment, il est important d’aborder sa complexité dramatique. Afin que l’impression de ne pas exister en tant que sujet ne soit pas confirmée, mais démentie par la vie…
Le plus difficile restant de renoncer à la tristesse, à l’émotion, à la nostalgie qui sont le corollaire d’un événement qui nous aura marqués, émus, rendus tristes. Quand le chagrin, la colère, après l’indifférence ont un petit goût qui nous permet de rester en lien avec l’objet de notre tourment. Il faut passer par cette épreuve de longue haleine mais combien libératrice pour se désengager d’une relation ancienne.

Un événement marquant, aussi cruel soit-il, devrait pouvoir, avec le temps, la distance, être traduit de façon positive. Question de regard, d’assimilation, d’enrichissement par l’expérience. D’histoire personnelle et d’imagination.. De transposition du passif en actif et de conversion d’énergie

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La douleur

Le concept de douleur est universel dans le sens où tout un chacun l’a déjà expérimentée. Elle accompagne l’être humain tout au long de sa vie, tenant le rôle d’éducateur, d’alarme, d’inquisiteur, de maître parfois. Le monde médical s’est donné pour but de la réduire au silence, et, pour cela, use de mesures ou de techniques toujours plus avancées pour la traquer et ainsi mieux l’éradiquer. Mais malgré tout, la douleur réussit encore à se cacher et à apparaître là où on ne l’attend pas. Elle est le symptôme subjectif par excellence. Pour René Leriche « la santé c’est le silence des organes » la douleur, elle, met le corps à vif, rappelant à l’homme sa dépendance soudaine à un corps qui lui échappe.

La douleur est profondément intime. Elle vient dire quelque chose du malade. Toute douleur corporelle est de nature psychique, et la sensation douloureuse se vit à tort dans le corps, alors qu’elle se situe, en vérité, dans le cerveau. Ainsi que l’émotion douloureuse, qui elle, se situe dans les soubassements du Moi, au niveau du Ça.
Cette douleur résulte de l’affect qu’éprouve le Moi lorsque, blessé, il surinvestit la représentation psychique de la blessure dans un effort pour se défendre. Cette lutte défensive est, hélas, inadéquate et ne fait que décupler la douleur. La douleur psychique est formée d’un sentiment obscur, inintelligible et cabalistique, qui se dérobe au rationnel. A la différence de la douleur corporelle, il n’y a ici aucune atteinte tissulaire.
La douleur est toujours frappée par l’immédiateté et l’imprévisibilité. Quand une douleur apparaît, c’est que nous sommes en train de traverser une épreuve décisive. Cette épreuve, est l’épreuve d’une séparation subite ou définitive avec un objet. Cette séparation va nous tourmenter, nous bouleverser, au point où nous sommes acculés à nous reconstruire. La douleur psychique serait donc une douleur de séparation, dans le cas où cette séparation est vécue pour nous comme un arrachement à cet objet désiré. Il est important de préciser que cette douleur psychique ne se limite pas à cette perte de l’être aimé, mais concerne également ce qui se rapporte à l’humiliation, la mutilation, l’abandon. Le deuil, l’abandon, l’humiliation et la mutilation se rapportent tous les quatre à un objet aimé, à des degrés divers. Cet objet aimé est ce qui permet de réguler notre psychisme, afin que ce dernier soit en parfaite harmonie. Cette douleur émane du Ça, car le Ça correspond à la perte. La douleur est dans les soubassement du Moi.
Le psychanalyste J.-D. Nasio affirme « qu’il n’est de douleur que sur fond d’amour ». Il montre alors que la douleur psychique est en lien avec le narcissisme. Il y aurait de ce fait, un changement d’investissement qui passerait du narcissique à l’objet convoité. En somme, être amoureux est ce qui affaiblit le plus nos défenses face à la douleur. J.-D. Nasio définit la douleur psychique comme « l’affect qui résulte de la rupture brutale du lien qui nous attache à l’être ou à la chose aimée».

Freud parle du deuil comme l’une des quatre circonstances de la douleur psychique, et plus précisément du travail du deuil. Le deuil de l’aimé est ce qui permet de comprendre au mieux la douleur mentale. Le deuil, contrairement à la douleur de la perte, peut s’éterniser tout au long de l’existence de l’individu, en paralysant sa vie d’endeuillé. Freud dit que « l’endeuillé sait qui il a perdu, mais ne sait pas ce qu’il a perdu en perdant son aimé ». Toutefois, il est important de préciser que la vraie cause de la douleur n’est pas la perte en elle même, mais plutôt l’effondrement du fantasme qui a été construit avec l’objet. Le Moi est ici dissocié face à cette douleur d’aimer. Le moi est tiraillé entre son amour effréné de l’objet perdu et sa constatation de l’absence de cet objet. Autrement dit, le moi continu psychiquement à aimer l’objet perdu tout en reconnaissant en même temps qu’il ne reviendra jamais. Ce qui est douloureux ici, c’est de continuer à aimer l’être que nous avons perdu. Il y a donc une dissociation entre aimer et savoir. Cette lacune du Moi entre l’absence de l’autre et sa présence vivante en moi se rapporte au mécanisme de défense qui correspond au clivage.

Parler de sa douleur :

La douleur est le premier mobile de la consultation médicale. Le malade prend sa douleur et la « dépose » au pied du médecin qui se doit de la nommer, de lui donner un sens et enfin de l’éradiquer. Mais la douleur, dans sa singularité, rend difficile toute tentative d’expression verbale et objective. Comme l’écrit David Le Breton « La douleur est un échec radical du langage ». En effet, comment exprimer de manière rationnelle ce fait si personnel et intime qu’est l’expérience de la douleur ? Celle-ci s’éprouve mais ne se raconte pas.
Elle met en évidence la défaillance de la pensée et de la parole en la paralysant : quand on a mal, on gémit, on pleure, on crie, on se plaint ou l’on se tait. Ici, pas besoin d’un vocabulaire recherché sur ce que l’on éprouve. Le langage se vide, créant un écran entre le malade et les autres.
La norme sociale est inhibée au profit de l’expression de la douleur.
L’individu s’autorise le droit de ne plus répondre à la norme collective, et s’en voit rejeté, l’isolant d’autant plus des autres.
Il n’est pas rare non plus de voir des patients proférer des insultes et des remarques acerbes sous le coup de la douleur, qu’ils regrettent aussitôt. La douleur peut rendre le sujet méconnaissable même pour ses proches. Elle s’insinue en l’individu et devient maître de son corps, elle impose sa présence et vient modifier subtilement la totalité du rapport au monde. Elle devient donc une menace pour l’identité du sujet.

La douleur est un concept universel et singulier. Nous l’éprouvons tous au cours de notre vie, à des intensités plus ou moins fortes et sur des périodes plus ou moins longues. Qu’on en connaisse la cause, ou au contraire qu’elle soit inconsciente, la douleur reste une expérience intime pour le sujet. Elle renvoie à une signification propre à l’individu dans sa singularité, et elle ne peut se traduire et se comprendre sans le sujet lui-même, et les séparer l’un de l’autre est un non sens.
Bien que la médecine ne la perçoive que comme une chose encombrante dont il faut se débarrasser au plus vite, la douleur a son utilité. Lui faire une place, permet de faire une place au sujet lui-même, et, ainsi, l’écouter dans ce qu’il a à dire à travers sa douleur. Car la douleur peut également être vue comme un signal d’alarme que lance l’individu au monde, elle rend le sujet vivant.
Et comme le dit David Le Breton : « Elle rappelle à la ferveur d’exister. Elle est un memento mori qui ramène l’homme à l’essentiel. » (2006).

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L’inconscient

L’inconscient est la zone de notre être où sont stockées des informations non perceptibles, non connues, non maîtrisées. Il se révèle à travers les lapsus, les actes manqués, les oublis.
Les psychanalystes tendent à dire que la traduction de l’inconscient relève du langage. Mais quel langage exactement ? Est-ce un langage acquis ou inné ? Ou est-ce tout simplement un langage que l’on ne maîtrise pas, que l’on ne connaît pas et que l’on ne peut déchiffrer ? N’y a-t-il pas une autre forme que le langage pour analyser l’inconscient ? Doit-on s’en tenir à ce qui est d’ordre psychologique et de l’ordre du physique ?
En dehors du langage, plusieurs points doivent être pris en considération par le sujet : l’observation directe de soi, l’attention à soi, à son propre corps, à ses émotions et à ses pensées. La question de la conscience et du non-conscient est directement liée au langage et est une réalité du présent car la perception n’est réelle qu’ici et maintenant. Il n’y a pas de perception « d’hier » et il n’y a pas de perception de ce qui n’existe pas encore. Les théories, la pensée donc, ont quelque chose à dire sur le passé et sur son lien à maintenant. Les rêves et l’imaginaire s’intéressent à demain. L’observation quant à elle, est maintenant, ancrée dans le présent. Le présent n’est pas assez pris en compte dans les psychothérapies. Il faut pouvoir être capable d’observer et de s’observer…
Certains auteurs comme Gurdjieff puis, Aïssel, ont montré qu’il faut pouvoir être capable de percevoir directement les choses pour ce qu’elles sont, et ainsi en acceptant la réalité pour ce qu’elle est. Ce n’est pas chose facile, et c’est presque impossible dans le cadre de la mouvance fortement ancrée dans les sociétés dites modernes : tout, tout de suite et sans effort.

Ainsi, en observant nos attitudes physiques, émotionnelles et intellectuelles, il est possible de développer la conscience et permettre ainsi de mettre en évidence les fonctionnements inconscients. En étant suffisamment éveillé, c’est-à-dire en se détachant de ce que la société façonne chez l’homme (des êtres stéréotypés et instrumentalisés); il est possible par le langage et par cette perception antagoniste que la société tente de véhiculer, de mieux être à même de comprendre notre psychisme.
La spiritualité serait alors, le moyen pour sortir de cette aliénation, car en prenant conscience de soi même, de ce que je suis, nous facilitons le travail de conscience. Comme le disait si bien Socrate, “Connais-toi toi-même”. Pour lui, cette connaissance de soi-même ne peut se faire que grâce à la maïeutique, c’est-à-dire le dialogue entre l’âme et elle-même, ou bien entre un élève et son maître. Socrate se présente ainsi souvent, dans son rôle de questionneur, comme un accoucheur d’âme. Socrate questionne parce qu’il ne sait rien, sait qu’il ne sait rien, il n’a rien à apprendre, et c’est ce que l’homme d’aujourd’hui doit faire, en sortant de ce système qui l’annihile. Dès lors que l’on s’interroge sur sa vie, on est dans la spiritualité. Jung avait déjà fait ce travail de son vivant, en associant la psychanalyse et la spiritualité. Ses disciplines permettent d’allier la libération à la guérison.

La psychanalyse a un rôle essentiel car c’est elle qui va permettre de travailler en « profondeur », afin de mieux s’interroger sur sa vie. Une vision spirituelle du métier de psychanalyste permet de rompre le cercle du mal être, en montrant que le mal n’a pas pour origine l’homme mais le serpent, un monstre qui n’a rien en commun avec nous. Ainsi, en faisant en sorte que l’homme s’apprécie, se pardonne à lui même, qu’il s’aime pour ce qu’il est, et non pour ce que la société voudrait qu’il soit, il est possible qu’il accède bien plus facilement à son inconscient. Ainsi, le langage, qu’il soit natif ou étranger, pourrait suffire à soulever le refoulement et à faire prendre pleinement conscience au sujet de son psychisme inconscient.

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Le Vide

[Le vide ]

Toute notre vie tourne autour de la question du vide.
Qui suis-je ? Presque rien ! Et, il en est de même pour les planètes, les ordinateurs ou les légumes. Car toute chose, vivante ou inerte, présente sur Terre ou dans l’espace, est constituée d’atomes. Les atomes, sont constitués de vide à pratiquement 100%. L’être humain est donc constitué de vide à 99,9999 %.
Ce vide est un reste appelé le « manque-à-être », désignant le vide fondamental dans la structure du sujet. Le vide est présent en chacun de nous, et nous essayons de le combler du mieux possible, mais pas toujours de la meilleure des manières. Par exemple, les personnes ayant des troubles alimentaires, sont celles qui, dans certains cas, peuvent vouloir remplir ce vide (boulimie) parce qu’elles pensent que le combler va les rassurer, les apaiser. Cette compensation se fait en faisant le vide autour d’eux ou en eux (régurgitation), comme une manière d’évacuer le trop plein.
L’anorexie de son côté, fonctionne de façon inverse, outre l’idée de refuser sa féminité par l’apparition des formes (dans le cas d’un sujet féminin), donc de grandir, il y a cette contre-phobie du vide, entrainant bien souvent un vacillement entre boulimie-anorexie qui correspond à une phobie, contre-phobie du vide. Un trop gros contrôle de son corps/de soi entraine un clivage psychique; étant donné qu’il y a un équilibre pour chaque chose. Sans contrôle, un risque de décompensation est possible. Obturer un chakra, en l’occurrence le chakra du plexus solaire, empêche l’harmonie de notre système énergétique, entrainant sur le long terme la formation d’un trou énergétique à un tout autre endroit, provoquant une disharmonie.

Quand nous nous considérons comme des coquilles vides, minces, creuses, nous cherchons sans arrêt à remplir ce vide en incorporant/ingérant des objets externes significatifs. Et c’est dans cet espace vide que se ruent des motions pulsionnelles brutes ou à peine élaborées, laissant place à l’irrationalité.
Mais le vide, ce vide dans notre vie, serait-il l’absence ? Ou plutôt ce qui échoit à une absence dont l’objet se serait retiré. Une absence sans absent dirions nous, ou plus encore une absence semblable à une enveloppe vide. En deux mots : une absence hors le temps, sans frontière. Cette absence du vide, n’entrainerait-elle donc pas une dépendance ? Une dépendance à cette absence du vide ?
Ce vide stipule implicitement que la recherche active du vide trahit la compulsion à répéter le non-être d’une rupture primitive dans la continuité d’exister, véritable traumatisme psychique. “Pas de mot pour décrire ce vide intérieur qui aspire ma vie”.

Ainsi, la destructivité est présente chez le sujet qui enrage de se voir si faible, si dépendant d’un objet qui ne répond pas à ses attentes. Dépendant de cet objet qu’il ne maitrise pas, qu’il n’arrive pas à verbaliser, dont il n’arrive pas à échapper. Il s’impute alors une telle faute qu’elle touche son être-même, d’où les effets délétères sur le narcissisme auxquels s’ajoute l’identification à la mort de la mère ou au vide de la mère.
Mais, pourquoi tout se rapporte à la mère ? Car la clinique du vide ou la clinique du négatif est le résultat d’un désinvestissement massif, radical et temporaire de l’objet primaire, qui n’est rien d’autre que la mère. La perte d’amour est un traumatisme narcissique et la désillusion brutale est une perte de sens, que l’enfant attribue à ses pulsions envers l’objet ou à son investissement du tiers, ce qui est encore plus désastreux sur le plan des investissements libidinaux. Ainsi, l’enfant, devant son impuissance à réparer la relation avec la mère et devant l’inefficacité des signes d’appel que sont les cauchemars, etc. (moment où il veut se retrouver seul avec sa mère), le Moi utilise d’autres défenses pour lutter contre l’angoisse. La première est le désinvestissement de l’objet maternel, qui est un véritable meurtre psychique de l’objet et, en même temps, l’identification à la mère morte. Si l’enfant n’intéresse plus la mère, à la fois elle devient sans intérêt et à la fois il SE vit comme sans intérêt.

De ce fait, la perte du sens, de sens, déclenche une régression à des positions/aux stades anal(e)s , c’est-à-dire à des désirs de maîtrise et de vengeance, ainsi qu’une réticence à aimer, une prédilection pour l’auto-érotisme, et une dissociation entre le corps et la psyché. La maitrise sphinctérienne permet de frustrer la mère, qui s’inquiète pour son enfant. Ainsi l’omnipotence de l’enfant prend place, comblant ce vide par le contrôle sur la mère. Les anorexiques et boulimiques sont dans un système où leurs troubles entrainent des complications. Ils s’infligent les répercussions de ces complications ; se prouvant qu’ils ont toujours l’omnipotence, mais qui n’est plus à l’encontre de la mère (morte), car n’ayant pas la maitrise sur ce contrôle, signe désarmant pour elle, cela l’oblige à continuer ainsi jusqu’à ce qu’une solution apparaisse. De ce fait, le sujet, habité par la mère morte, redoute de s’impliquer profondément dans les relations objectales (qui se produisent malgré lui) et toute déception, quasiment inévitable de ce fait, se traduit par la résurgence de la douleur psychique et aussi par l’impossibilité d’introjection d’un quelconque “bon objet” pour remplacer celui qu’une relation affective satisfaisante avec la mère aurait dû constituer.
Mais alors, tout vide provient-il nécessairement de la mère ? Cette dépendance à cette absence de vide, comblée par la mère dans notre enfance, mais aussi cette dépendance à la mère ne doit être présente qu’un temps. Une mère répondant trop à la dépendance de l’enfant, ne permet pas à la mère morte d’emporter, dans le désinvestissement dont elle avait été l’objet, l’essentiel de l’amour dont elle avait investie avant le deuil de son enfant : son regard, le ton de sa voix, son odeur, le souvenir de sa caresse.
Comme Green le souligne, « Il y a alors un enkystement de l’objet et effacement de sa trace par désinvestissement, il y a eu identification primaire à la mère morte et transformation de l’identification positive en identification négative, c’est-à-dire identification au trou laissé par le désinvestissement et non à l’objet”.
L’objet “vide” mène au vide d’objet ; vide qui permet de comprendre pourquoi la solitude est tellement désarçonnante et malgré tout recherchée.
L’enfant doit alors faire son oedipe, afin de sortir de cette dépendance d’avec la mère. Lorsque l’enfant entre dans le complexe d’Oedipe, il est mis dans l’obligation de renoncer à l’objet, d’ accepter qu’il n’est pas tout pour sa mère, ce qui suppose qu’il ait reçu de réelles satisfactions.
Chez les personnes anorexiques et boulimiques, le deuil de la mère n’est pas fait, n’ayant pas procédé de la sorte. Ainsi, non seulement il y a ce désir inconscient de rester enfant, afin d’être soutenue par la mère, la seule capable de combler ce vide. Mais, par ce « jeu de rôle » du passage d’un cycle à l’autre, de cette volonté de créer un trop plein ou un trop vide, est tributaire du rôle de la mère. Dans le complexe de la mère morte, le deuil est impossible, la perte inélaborable. Comme l’indique Mahler “nous assistons à l’échec de l’expérience de séparation individuante où le jeune Moi, au lieu de constituer le réceptacle des investissements postérieurs à la séparation, s’acharne à retenir l’objet primaire et revit répétitivement sa perte, ce qui entraîne au niveau du moi primaire confondu avec l’objet, le sentiment d’une déplétion narcissique se traduisant phénoménologiquement par le sentiment de vide, si caractéristique de la dépression, qui est toujours le résultat d’une blessure narcissique avec déperdition libidinale”. Cette perte narcissique perturbe le dépassement de la position dépressive.
Cette angoisse du vide, est aussi présente par exemple chez les personnes suppliciant leur peau. La peau représente d’abord les limites du corps, soit entre l’interne et l’externe. Se situant donc entre le dedans et le dehors, le « Moi-peau » (Anzieu) est ce qui fonde la relation contenant/contenu.
La peau est aussi le morceau de chair qui relie l’enfant à sa mère, et dans le fantasme de l’enfant c’est une « peau commune » qui les unit. L’angoisse d’être arraché à la mère et déchiré de cette peau est notée par D. Anzieu comme  » l’origine à la fois de blessures et du masochisme ».

Le vide est comme il a été indiqué plus haut, hors du temps et sans frontière. La peau représentant les bords entre l’interne et l’externe, une défaillance précoce aboutit à des frontières floues voire inexistantes « entre le Moi psychique et le Moi corporel, entre le Moi réalité et le Moi idéal, ce dépend de soi et de ce qui dépend d’autrui » (Anzieu).
Lorsque la constitution du « Moi-Peau » est défaillante (c’est-à-dire lorsque l’enfant n’arrive pas à différencier la couche externe [faisant écran aux stimulations extérieures], de la couche interne [contient les processus psychiques, le monde intérieur des pensées, des images, des affects]. Ou plus exactement lorsque l’on n’arrive pas à différencier le Moi corporel du Moi psychique. Nous cherchons à instaurer cette frontière, à trouver une frontière à ce vide, puis à la réduire, pour pouvoir le faire disparaitre) son inscription se fait alors en négatif, dans un « attachement au négatif » emprunt de destructivité. L’auto-effacement pulsionnel fait suite à l’attachement empli d’autodestruction, provoquant un artifice d’attachement, préférable à l’indifférence de la mère, conduisant à un vide identificatoire, laissant un trou dans l’être.

Le vide identitaire et identificatoire, se manifeste selon de multiples configurations mais trouve toujours sa source là où quelque chose n’a pas eu (de) lieu.
« L’impensable fait le pensé. Ce qui n’a pas été vécu, éprouvé, ce qui échappe à toute possibilité de mémorisation est au creux de l’être. Ce blanc, répétons- le, n’est pas le simple blanc du discours, le gommé, l’effacé de la censure, le latent du manifeste. Il est, dans sa présence-absence, témoin d’un non-vécu.» Pontalis

Toute notre vie repose sur cette question d’équilibre, entre le plein et le vide.
« Vide ton esprit de toi même »

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